ἁγιασθήτω τὸ ὄνομά σου, (hagiasthếtô tò ónoma sou·) soit sanctifié ton nom (trad. Simone Weil)
1 Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu.
2 Elle était au commencement avec Dieu.
3 Tout a été fait par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle.
4 En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes.
Évangile de Jean 1, 1-4
Dieu n'est-il pas saint par
définition ? Pourquoi son nom devrait-il être sanctifié ou,
pour le dire autrement, comment pourrait-il ne pas l'être ?
Le nom dans la pensée antique se
confond avec la chose désignée. Ainsi pour les Grecs anciens, le
fait de « nommer » le divin et de lui attribuer tel ou
tel adjectif permettait de caractériser le dieu particulier de telle
cité dans la grande diversité de panthéon olympien. L'institution
d'un dieu en tant que divinité reconnue et honorée par le groupe
social constitué en Cité passe par cette « nomination ».
Et toute la question de la religion grecque puis de la philosophie
qui lui succède revient à savoir quel nom il faut donner au divin.
Ainsi le nom de Zeus (Ζηνὸς) signifie « la vie »
(ζῆν est l'infinitif du verbe ζάω « vivre »).
Nommer son Dieu (Διός) revient à dire ce qu'il est, à quoi il
sert et comment il faut le servir.
À l'inverse de cette nomination par
l'homme, le Dieu d'Israël se présente lui même à Moïse dans
l'épisode du buisson ardent (Exode 3, 13-15) par une conjugaison du
verbe « être », un nom qui signifie simplement « Je
suis » et qui est devenu Yahweh (YHWH),« L'Éternel ».
Ainsi le Dieu d'Israël est, au sens propre, ce qui est dans toutes
les dimensions de l'être, à la fois, passé, présent et avenir.
Ainsi lorsque nous demandons que le nom
de Dieu soit sanctifié, nous ne faisons rien d'autre que reconnaître
notre impossibilité de définir une fois pour toutes ce qui est et
de maîtriser le cours de l'être. C'est là que se trouve le secret
de la prière, dans la capacité à laisser advenir ce qui est. « En
demandant cette sanctification, nous demandons ce qui est
éternellement, avec une plénitude de réalité à laquelle il n'est
pas en notre pouvoir d'ajouter ou de retrancher même un infiniment
petit » (Simone Weil, Le Notre Père, p.33).
Lorsque l'évangile de Jean désigne
Jésus comme étant « la Parole » (ou le Verbe dans les
traditions catholiques) pour le distinguer du Père et de l'Esprit,
il souligne l'identité de Dieu dont la vie et le message de Jésus
sont la meilleure définition qui puisse être à ses yeux.
Penser à propos de Dieu que « son
nom est sa parole. C'est le Verbe. Le nom d'un être quelconque est
(…) la seule voie par laquelle l'esprit humain puisse saisir
quelque chose de cet être quand il est absent. (or) Dieu est
absent ; il est dans les cieux. » (Simone Weil, Le Notre
Père, p.33) nous fait sortir de notre imaginaire de Dieu, de l'idée
à laquelle nous aimerions qu'il corresponde. Il est heureux que nous
ne puissions jamais prétendre posséder la juste idée de Dieu qui
alors nous ressemblerait.
Demander « Que ton nom soit
sanctifié » revient à ne jamais confondre Dieu avec l'idée
que nous nous en faisons, autrement dit revient à ne jamais le
considérer comme une idole, serait-elle seule au monde.
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En période de confinement et alors que nous sommes appelés à prier les uns pour les autres ainsi que pour les malades du Covid-19 ainsi que les soignants et tous les services d'urgence qui nous aident à surmonter cette situation, il est utile de réfléchir au sens de nos prières et d'abord de la plus connue d'entre elles, le Notre Père que l'on trouve dans l'évangile de Matthieu au chapitre 6.
C'est avec la philosophe Simone Weil
que nous vous proposons chaque jour, une méditation explication de
nos demandes.
Samedi 4 avril Que ton nom soit sanctifié ;
Il s'agit ici de la version liturgique
traditionnellement en usage dans nos Églises protestantes.
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