Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu !

Vendredi 17 avril
Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu !
(Makarioi hoi katharoi tê kardia Hoti autoi ton Theon opsontai)

Mais l’heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car ce sont là les adorateurs que le Père demande.
Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent l’adorent en esprit et en vérité.
Jean 4, 23-24

La notion de pureté est indissociable de la pratique des religions fondées sur le sacrifice rituel. Des mystères grecs au code de sainteté du Lévitique, le livre biblique détaillant les règles des sacrifices, jusqu'à nos jours dans toutes les religions, la conformité du rite est nécessaire pour entrer en relation avec le divin. Pureté de l'animal sacrifié ou pureté du sacrificateur, pureté du sacrifiant, des rives de l'Indus aux contreforts de l'Olympe en passant par les autels du temple de Jérusalem et aujourd'hui jusqu'aux autels de nos Églises, le divin ne se laisse connaître et découvrir qu'à la condition de la perfection symbolisant la pureté. Même nos conceptions contemporaines relatives au sacrifice symbolique que sont l'eucharistie ou la cène n'échappent pas à cette notion de pureté de l'agneau pascal, sans doute parce que nous ne pouvons nous départir d'une vision sacrificielle de la foi.

Les dieux ont besoin de sang et de bonnes odeurs. Ils ont besoin d'être entretenus, lavés et nourris par des offrandes qui nous les rendent favorables. C'est ainsi depuis que les premiers hominidés sont parvenus à une représentation symbolique de la réalité et cela fait certainement partie de la nature de l'homme que de croire que son dieu a les mêmes besoins que lui. C'est d'ailleurs ce que dit la femme Samaritaine à Jésus lors de leur rencontre au puits (Jean 4, 1-42). Elle l'entraîne sur une question de pratique rituelle, la bonne montagne pour accomplir les sacrifices, il répond que le vrai lieu du service divin n'est autre que le cœur de l'homme, que ce n'est pas en tel lieu et de telle manière que l'on doit servir Dieu mais « en esprit et en vérité ».

Ce qui est une illustration de notre sixième béatitude. Dès lors, la question n'est plus la pureté formelle de nos sacrifices, ni même la perfection de nos vies, ni de savoir si l'Éternel a besoin du sacrifice de son fils unique. La question qui compte réellement devient la purification de notre cœur. Dans la compréhension biblique, le « cœur » désigne tout ce qui est intérieur à l'homme, en opposition avec son apparence. Le cœur des Béatitudes c'est ce qui ne se voit pas ou, plutôt ne se voit pas autrement que dans la qualité de nos actes et de nos paroles. S'il est vrai que « l'on reconnaît un arbre à son fruit », la vérité de nos intentions et de notre foi ne peut se connaître que dans leurs manifestations extérieures selon que nous faisons du bien ou du mal à autrui. Autrement dit, à la manière de Simone Weil « On ne peut pas savoir ce qu'un homme a dans l'esprit quand il prononce tel mot (Dieu, liberté, progrès…). On ne peut juger le bien qu'il a dans son âme que par le bien qui est dans ses actes ». (La connaissance surnaturelle, K14.48)

Cette correspondance entre la pureté, ou sanctification, du cœur et la manifestation de Dieu qui se laisse voir éclaire différemment la question de la présence des chrétiens et des Églises dans le monde. C'est dans nos actes concrets de solidarité et de compassion avec ceux qui souffrent, de quelque nom que s'appelle leur souffrance (2e béatitude), c'est dans une véritable prévenance envers autrui (3e), dans la lutte constante pour la justice et le droit de ceux qui sont opprimés (4e), c'est dans l'exercice de cette largesse, hauteur et profondeur de vue qu'est la miséricorde (5e) que nous donnons à voir et à connaître qui est Dieu pour nous et pour le monde.

« En esprit et en vérité », c'est aussi changer nos comportements et même nos intentions. Il ne s'agit plus de sacrifices pour se concilier les bonnes grâces de Dieu et nous éviter le malheur ou attirer le bonheur sur nous-mêmes. Il s'agit d'une véritable sincérité dans l'attention à l'autre et la recherche de son bien sans autre intérêt que le sien propre. C'est ainsi que nous manifesterons la grâce de Dieu et que nous le verrons dans le bien qui est fait autour de nous.

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Durant la période du confinement, nous continuons à vous proposer des méditations quotidiennes. C'est une manière de réfléchir au monde que nous voulons construire ensemble après cette crise dont nous tardons encore à comprendre toutes les conséquences.

Après la méditation du Notre Père, revu et corrigé par Simone Weil, c'est avec les Béatitudes que nous continuons notre série.

Les méditations sont publiées chaque jour à 10h, elles peuvent aussi vous être envoyées chaque jour sur simple demande.

Samedi 11 avril, introduction "Quel est le sens des béatitudes ?"
Lundi 20 avril Quelles Béatitudes pour notre temps ?

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