Mais moi, je vous dis de ne pas jurer

Jeudi 7 mai 2020 : 33 Vous avez encore entendu qu’il a été dit aux anciens : Tu ne te parjureras pas mais tu t’acquitteras envers le Seigneur de tes serments. 34 Mais moi, je vous dis de ne pas jurer : ni par le ciel, parce que c’est le trône de Dieu. 35 ni par la terre, parce que c’est son marchepied, ni par Jérusalem, parce que c’est la ville du grand roi. 36 Ne jure pas non plus par ta tête, car tu ne peux rendre blanc ou noir un seul cheveu. 37 Que votre parole soit oui, oui ; non, non ; ce qu’on y ajoute vient du malin.

33 Πάλιν ἠκούσατε ὅτι ἐρρέθη τοῖς ἀρχαίοις· Οὐκ ἐπιορκήσεις, ἀποδώσεις δὲ τῷ κυρίῳ τοὺς ὅρκους σου. 34 ἐγὼ δὲ λέγω ὑμῖν μὴ ὀμόσαι ὅλως· μήτε ἐν τῷ οὐρανῷ, ὅτι θρόνος ἐστὶν τοῦ θεοῦ· 35 μήτε ἐν τῇ γῇ, ὅτι ὑποπόδιόν ἐστιν τῶν ποδῶν αὐτοῦ· μήτε εἰς Ἱεροσόλυμα, ὅτι πόλις ἐστὶν τοῦ μεγάλου βασιλέως· 36 μήτε ἐν τῇ κεφαλῇ σου ὀμόσῃς, ὅτι οὐ δύνασαι μίαν τρίχα λευκὴν ⸂ποιῆσαι ἢ μέλαιναν⸃. 37 ἔστω δὲ ὁ λόγος ὑμῶν ναὶ ναί, οὒ οὔ· τὸ δὲ περισσὸν τούτων ἐκ τοῦ πονηροῦ ἐστιν.

34 egô de legô humin mê homosai olôs

4 Voyez encore les navires : si grands qu’ils soient, et poussés par des vents impétueux, ils sont dirigés par un très petit gouvernail au gré du pilote. 5 De même, la langue est un petit membre, mais elle a de grandes prétentions. Voyez comme un petit feu peut embraser une grande forêt. 6 Or la langue aussi est un feu, elle est le monde de l’injustice : la langue a sa place parmi nos membres, elle souille tout le corps et embrase tout le cours de l’existence, embrasée qu’elle est par la géhenne. 7 Toutes les espèces de bêtes sauvages, d’oiseaux, de reptiles, d’animaux marins sont domptées et ont été domptées par l’espèce humaine 8 mais la langue, aucun homme ne peut la dompter : c’est un mal qu’on ne peut maîtriser ; elle est pleine d’un venin mortel. 9 Par elle, nous bénissons le Seigneur notre Père, et par elle, nous maudissons les hommes faits à l’image de Dieu. 10 De la même bouche sortent la bénédiction et la malédiction. Il ne faut pas, mes frères, qu’il en soit ainsi

Jacques 3, 4-10

Tous ceux qui sont familiers des films de procès américains connaissent cette scène du serment sur la Bible par lequel le témoin jure de « dire toute la vérité et rien que la vérité » comme si son destin éternel en dépendait. Ce qui n'a pourtant pas empêché l'actuel président des États-Unis d'Amérique de prêter serment sur une Bible qu'il n'a sans doute jamais lue. Nous connaissons tous aussi cette interdiction du juron utilisant le nom de Dieu. Les anciens disaient ainsi « Parbleu » ou « sacrebleu » au lieu de « Par Dieu » ou « sacré Dieu ». Même si nos jurons modernes sont depuis longtemps désacralisés, avantage de la laïcité et de la sécularisation, le serment sur la Bible et le juron sur Dieu procèdent de la même logique de l'invocation par laquelle nous commençons nos cultes. À savoir se placer sous le regard d'un Dieu que nous croyons nous voir et nous entendre.

Dans notre méditation du 3e commandement, « Tu ne prendras pas le nom de Dieu en vain », nous avions insisté sur la nécessaire cohérence entre le « dire » et le « faire ». Dans la mesure où nous prétendons porter le nom de chrétiens, il nous faut rechercher la correspondance entre nos prières et nos modes de vie et tirer les conséquences en actes de notre foi. À nouveau Jésus va plus loin lorsqu'il nous demande de ne jurer ni par le ciel ni par la terre, c'est-à-dire de n'invoquer ni le ciel ni la terre pour nous affranchir de nos responsabilités, individuelles ou collectives. Il n'y a ni volonté divine de punir l'humanité ni complot de quelque entité occulte que ce soit qui expliqueraient la situation où nous sommes.

La crise sanitaire, économique et sociale que nous vivons est également l'occasion d'une débauche de prises de positions enflammées, en faveur ou en défaveur de telle ou telle expertise plutôt que de telle autre. Il est bien sûr essentiel de chercher à comprendre les causes et les mécanismes qui nous ont conduits dans cette situation. Il est également vital de préserver la discussion démocratique sur les moyens de lutter contre la pandémie et d'envisager la société que nous espérons au sortir de cette crise. Mais il nous faut préserver les conditions de ce débat démocratique et citoyen. En évitant aussi bien les procès d'intention que les discours culpabilisateurs ou infantilisants, sans nous laisser séduire par des opinions fondées sur des rumeurs, analyses ou expertises, affirmant un jour qu'il n'y a pas d'autre alternative et se contredisant le lendemain.

Une certaine ascèse du langage et une vigilance attentive du jugement sont ainsi nécessaires aujourd'hui. À tout le moins si nous sommes convaincus avec Jésus que les mots ont un sens et que nous ne pouvons cèder à tous les vents, bénir et maudire d'une même bouche. Cette éthique du langage signifie que nous devons savoir au nom de qui et de quoi nous parlons, afin de trouver un sens à notre monde et à son histoire. Il nous faut savoir ce que parler veut dire ! C'est que notre parole soit, autant que possible en toutes circonstances, à la fois signe de l'alliance de Dieu et engagement à servir nos frères et sœurs en humanité.

--------------------------------------------------------
De très nombreuses analyses circulent pour envisager le monde à venir, parfois dans des perspectives catastrophiques, parfois utopiques et parfois pleines d'espérance pour une monde plus généreux, plus fraternel en tout cas plus humain.

C'est cette dernière perspective que, ne voulant pas rester dans le contexte de l'actualité, mais rechercher du sens et des principes directeurs pour cette vie nouvelle qui nous attend, nous poursuivons avec vous nos méditations théologiques car nous sommes persuadés que "Penser Dieu, ce n'est pas autre chose qu'une certaine manière de penser le monde".

Après le Notre Père, les Béatitudes, le Décalogue, c'est maintenant les "antithèses" de Jésus (Vous avez entendu (…) mais moi je vous dis…" qui nous intéressent

Elles se trouvent dans l'évangile de Matthieu au chapitre 5, versets 17 à 48
 
Dimanche 3 mai 2020 : Je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir.


Jeudi 7 mai 2020 : Mais moi, je vous dis de ne pas jurer

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire