L'Heure Musicale virtuelle du 30 octobre

 Samedi 30 octobre 2021

UN AUTRE BACH

Christoph GRAUPNER 1683 – 1760

En bleu adorable fleurit
Le toit de métal du clocher. Alentour
Plane un cri d’hirondelles, autour
S’étend le bleu le plus touchant. Le soleil
Au-dessus va très haut et colore la tôle,
Mais silencieuse, là-haut, dans le vent,
Chante la girouette. Que quelqu’
Un au-dessous de la cloche, descende les degrés, alors
Le silence sera une vie ; car,
Lorsqu’une figure à ce point se détache, la
Forme aussitôt ressort, de l’homme.
Les fenêtres, d’où les cloches tintent, sont
Comme des portes, par vertu de leur beauté. Oui,
Les portes encore étant de la nature, elles
Sont à l’image des arbres de la forêt. Mais la pureté
Est, elle, beauté aussi.
Du départ, au-dedans, naît un Esprit sévère.
Si simples, sont les images, si saintes,
Que parfois on a peur, à la vérité,

Elles, ici, de les décrire. Mais les Célestes,
Eux-mêmes bienfaisants, du tout, comme riches,
Ont telle retenue, et la joie. L’homme
En cela peut les imiter.
Un homme, quand la vie n’est que fatigue, un homme
Peut-il regarder en haut, et dire : tel
Aussi voudrais-je être ? Oui. Tant que dans son cœur
Dure la bienveillance, toujours pure,
L’homme peut avec le Divin se mesurer
Non sans bonheur. Dieu est-il inconnu ?
Est-il, comme le ciel, évident ? Je le croirais
Plutôt. Telle est la mesure de l’homme.
Riche en mérites, mais poétiquement toujours,
Sur terre habite l’homme. Mais l’ombre
De la nuit avec les étoiles n’est pas plus pure,
Si j’ose le dire, que
L’homme, qu’il faut appeler une image de Dieu.

Est-il sur la terre une mesure ? Il n’en est
Aucune. Jamais monde
Du Créateur n’a suspendu le cours du tonnerre.
Elle-même, une fleur est belle, parce qu’elle
Fleurit sous le soleil. Souvent l’œil
Trouve en cette vie des créatures
Qui seraient bien plus belles, encore, à nommer
Que les fleurs. Oh ! comme je le sais ! Car
À saigner de son corps, et au cœur même, de n’être plus
Entier, Dieu a-t-il plaisir ?
Mais l’âme doit
Demeurer, je le crois, pure, sinon, de la Toute-Puissance avec ses ailes
approchera
L’aigle, avec la louange de son chant
Et la voix de tant d’oiseaux. C’est
L’essence, c’est la forme de l’être.
Joli ruisseau, touchant quand tu parais
Et que tu roules, clair comme
L’œil de la Divinité, par la Voie Lactée,
Comme je te connais ! Des larmes, cependant,
Sourdent de l’œil. Une vie allègre, je la vois dans les formes mêmes
De la création alentour de moi fleurir, car
Sans erreur je la compare à des colombes seules
Parmi les tombes. Le rire,
On le dirait, m’afflige cependant, des hommes,
Car j’ai un cœur.
Voudrais-je être une comète ? je le crois. Parce qu’elles ont
La rapidité de l’oiseau ; elles fleurissent de feu,
Et sont dans leur pureté pareilles à l’enfant. Souhaiter un bien plus grand,
La nature de l’homme ne peut en présumer.
L’allégresse d’une telle retenue mérite elle aussi d’être louée
Par l’Esprit, sévère, qui d’entre
Les trois colonnes souffle, du jardin.
Une fille aimable doit couronner son front
De fleur de myrte, parce qu’elle est simple
Par essence, et, de sentiments.
Mais les myrtes sont en Grèce.

Que quelqu’un voie dans le miroir, un homme,
Voie son image alors, comme peinte, elle ressemble
À un tel homme. L’image de l’homme a des yeux, mais
La lune, elle, de la lumière. Le roi Œdipe a un
Œil en trop, peut-être. Ces douleurs, et
D’un homme tel, ont l’air indescriptibles,
Inexprimables, indicibles. Lorsque la pièce

A pu produire une chose pareille, du coup la voilà. Mais
De moi, maintenant, qu’advient-il, que je songe à toi ?
Comme des ruisseaux m’emportent la fin de quelque chose, là,
Et qui se déploie comme l’Asie. Cette douleur,
Naturellement, Œdipe la connaît. Pour cela, oui, naturellement.
Hercule a-t-il aussi souffert, lui ?
Certes. Les Dioscures dans leur amitié n’ont-ils pas,
Eux, supporté aussi une douleur ? Oui,
Lutter, comme Hercule, avec Dieu, c’est là une douleur. Mais
Être de ce qui ne meurt pas, et que la vie jalouse,
Est aussi une douleur.
Douleur aussi, cependant, lorsque l’été
Un homme est couvert de rousseurs —
Être de la tête aux pieds couvert de maintes taches ! Tel
Est le travail du beau soleil ; car
Il appelle toute chose à sa fin. Jeunes, il éclaire la route aux vivants,
Du charme de ses rayons, comme avec des roses.
Telles douleurs, elles paraissent, qu’Œdipe a supportées,
D’un homme, le pauvre, qui se plaint de quelque chose.
Fils de Laïus, pauvre étranger en Grèce !
Vivre est une mort, et la mort est aussi une vie.

Friedrich Hölderlin


Toute la playlist

Christoph Graupner - Ouverture in G-major - YouTube

Graupner: Herr, die Wasserströme erheben sich (Herreweghe) – YouTube

CHRISTOPH GRAUPNER: Concerto pour hautbois d'amour (GWV 302) - YouTube

Christof Graupner - Wo willst du hin betrübte Seele, Cantata 1709 - YouTube

Ses parents Christoph Graupner (1650-1721) et Maria Hochmuth (1653-1721), appartiennent à une famille de tailleurs et de drapiers.

Il reçoit ses premiers cours de chant du chantre de sa paroisse, Wolfgang Michael Mylius (1636-1712), et de l'organiste Nicolaus Küster.

En 1694, Nicolaus Küster est nommé organiste à Reichenbach, Ggraupner l'accompagne, et reste sous sa direction, jusqu'en 1696, où il entre à la Thomasschule de Leipzig. Il a entre autres professeurs Johann Schelle (1648-1701) et Johann Kuhnau (1660-1722), pour lequel il effectue des travaux de copie.

Il se rapproche de Georg Philipp Telemann (1681-1767), qui dirige le Collegium musicumn, et de Gottfried Grünewald (1673-1739).

Il achève ses études musicales en 1704, et entre à l'université pour suivre des cours de droit. En 1706, une invasion suédoise, le pousse à se réfugier à Hambourg.

En 1707, il succède à Johann Christian Schiefferdecker (1679-1732), comme claveciniste du Gänsemarktoper.

Entre 1707 et 1709, il compose cinq opéras : Dido etKönigin von Carthago avec le librettiste Hinrich Hinsch. Son autre librettiste est Barthold Feind, un juriste et humoriste. Il collabore peut-être avec Reinhard Keiser pour la composition de trois autres œuvres lyriques :

En 1709, il est nommé vice-maître de chapelle du Langrave du Hesse, Ernst Ludwig sous la direction de W. C. Briegel. À la mort de ce dernier, il obtient le poste de maître de chapelle en 1712. Il se marie en 1711 avec Sophie Elisabeth Eckard. Ils auront six fils et une fille. Le mari de sa belle sœur, le pasteur Johann Conrad Lichtenberg, de Neunkirchen (Neckar-Odenwald), écrira les textes de la plupart de ses cantates.

Christoph Graupner, Canon all'Unisono, en si majeur, GWV 218. Ensemble Nova Stravaganza : Wilbert Hazelzet (traverso), Lisa Marie Landgraf (violon), Dmitri Dichtiar (violoncelle), Siegbert Rampe (direction et clavecin).Enregistré en public à l'« Akademie Mont-Cenis in Herne » en 2006.

Sous la direction de Graupner, la chapelle de la cour (Hofkapelle) de Darmstadt connaît une période faste. Entre 1714 et 1718, elle emploie 40 musiciens. Il y compose de nombreux opéras. Mais les réductions financières opérées après 1719 conduisent à une diminution des effectifs. Les musiciens doivent trouver des emplois complémentaires, notamment dans l'administration de la cour. Graupner se tourne alors vers la composition de cantates ou de formes instrumentales.

En 1722-1723, il remporte le concours, contre Jean-Sébastien Bach (qui ne peut pas enseigner le latin), organisé pour pourvoir au remplacement de Teleman. Le Landgrave refuse son départ, et le gratifie d'une forte augmentation de ses rémunérations et avantages. Il reste à Darmatadt.

En 1754, sa vue défaillante, puis la cécité ralentissent sa production. Il a composé 1418 cantates d'église, 24 cantates profanes, 113 symphonies, environ 50 concertos, 86 ouvertures-suites, 36 sonates pour des ensemble instrumentaux, et un important corpus de musique pour claviers. Il a aussi accompli d'importants travaux de copie, appréciés par l'élégance de sa graphie.

Matthieu Denni

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