Celle consacrée à l'histoire est riche de l'esprit de synthèse et de prospective de Régis Debray tandis que la série sur les religions est brillante d'intelligence et d'attention au "fait".
Car souvent la religion est considérée comme tel, sun "fait religieux" voire un "fait divers". L'ancien révolutionnaire se sait revenu de son passé mais il plonge avec gourmandise et finesse dans les profondeurs de cette humanité qui, malgré ses actuels progrès techniques, n'est pas si loin de ses ancêtres, les premiers à avoir marqué un besoin de sacralité qui les a distingué de l'animalité.
"Croyance", "sacré", "religion", "Dieu", "anges" et "laïcité" sont autant de concepts remis dans la perspective longue de l'invariant humain.
Gallimard, France culture, 2016, 256 pp., 18€
Nouvelle édition mise à jour de ce manuel de remise à plat des à priori sur les religions, Odon Vallet nous explique pourquoi "Moïse était juif" est un anachronisme du même ordre que dire que "Jésus était chrétien" ou encore pourquoi il est incongru de croire que la laïcité serait une exception française. De même la fameuse "tolérance protestante" est battue en brèche, les protestants étant capables d'autant d'intolérance que bien d'autres religions.
Parfois ces idées fausses peuvent s'avérer terribles, ainsi celles qui prétendent que "Le coran interdit les images" ou "la Bible interdit les images rendent possible tous les destructions de l'art voire permettent le meurtre.
Il est donc fortement salutation de se remettre les idées en place en s'éloignant des fausses.
Albin Michel, 2016, 288 pp.
Le classique republié
L'un des ouvrages indispensables pour tous ceux qui s'intéressent aux religions dans leurs diversités comme signes justement de la grande unité de l'humanité qui, à travers les âges et les époques, a donné divers visages à ses divinités et diverses formes à ses sacralités mais y recherche toujours quelque chose qui la dépasse.
Mircea Eliade est sans aucun doute l'un des historiens des religions les plus importants. On lui doit entre autre l'ouvrage de référence, "Le sacré et le profane".
Ce dictionnaire, réparti en 33 religions aussi étranges que les religions des celtes ou le jaïnisme est essentiel pour comprendre la religion en tant que "système", c'est à dire un ensemble cohérent de représentations des rapports de l'individu avec son groupe social et de sa place dans l'organisation du monde.
L'ouvrage a ceci de particulier qu'il n'est pas à proprement parler l’œuvre de Mircea Eliade mais de son élève Ioan P. Couliano. La mort d'Eliade en 1986 a empêché sa supervision complète de l'ouvrage qui devait trouver sa place dans son Encyclopédie des Religions.
Presses de la renaissance, 352 pp., 19.90€
Dans une France traumatisée par les attentats et notamment celui du Bataclan en novembre 2015, l'évêque d'Evry, Michel Dubost, l'imam de cette même ville, Khalil Merroun et Michel Serfaty, fondateur de l'Amitié Judéo-Musulmane de France, se livrent à un débat sans concession mais avec une même ambition de contribuer à une meilleure compréhension entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas.
Tous trois fortement engagés dans le dialogue interreligieux, Michel Dubost est président du Conseil pour le dialogue interreligieux de la Conférence des Évêques de France, ils ont en commun également d'être nés tous trois au Maroc, sauf Merroun qui, né à Ceuta, une enclave espagnole sur le territoire marocain, est le seul à être né juridiquement en Europe...
Ils n'éludent pas les questions difficiles comme celle, par exemple de la formation des imams en France mais dans l'ensemble, ils dressent le portrait d'une France qui serait capable de se réconcilier avec ses religions.
On ne peut cependant que regretter qu'aucun pasteur n'ait été associé à ce débat pour peut-être faire entendre encore une autre voix.
Autrement, 2016, 254 pp. 17€
Contrairement à ceux qui croient qu'expliquer et chercher à comprendre reviendrait à excuser et légitimer, Thomas Kaufmann, professeur d'histoire de l'Église de l'Université de Göttingen n'excuse ne ne minimise en aucune manière l'antisémitisme de Martin Luther.
Simplement, il resitue l'homme Luther dans son époque et dans le contexte théologique dans lequel il évolue. Ce qui nous paraît scandaleux et ignoble aujourd'hui faisait partie de la normalité des intellectuels et des penseurs, chrétiens ou non, de la fin du Moyen-Âge qui vivait dans une peur panique de la fin du monde imminente et dans laquelle les juifs non convertis au christianisme jouaient un rôle éminent.
Luther n'est pas un "moderne", mais un croyant qui pensait que Dieu avait assigné une place spécifique dans l'histoire du Salut au peuple juif et que sa colère devait les poursuivre jusqu'à la fin des temps.
Les ouvrages en français sur cette question sont très rares, l'essai de Thomas Kaufmann en est d'autant plus important.
Labor et Fides, Genève, 2017, 228 pp. 25€
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