Le temps qui passe 7

 Jeudi 31 décembre 2020

Le temps n’est pas un concept empirique qui dérive d’une expérience quelconque. En effet, la simultanéité ou succession ne tomberait pas elle-même sous la perception, si la représentation du temps ne lui servait a priori de fondement. Ce n’est que sous cette supposition que l’on peut se représenter qu’une chose existe en même temps qu’une autre (simultanément) ou dans des temps différents (successivement).

E Kant

Laetitia Sioen

Lorsque le temps s’emballe,
Au fur et à
mesure la journée passe,
Une valse étourdissante bat la mesure.
Trois points de suspension,
Deux points d’explication,
Pour explorer les minutes qui s’écoulent.
Les engrenages s’entraînent,
Une virgule instaure le rythme,
Une apostrophe ponctue l’algorithme,
Des mots, des phrases, des lignes qui courent,
L’horizontal cherche la verticale,
Une idée puis une autre,
Un point final pour terminer.

Pour finir l'année – et sans commentaire - ces deux hommages aux chauves souris, animaux de l'année.

Matthieu Denni

Strauss II - Fledermaus Overture - Kleiber (1970) - YouTube

Polka Tic-Tac Mariss Jansons (2).mpg - YouTube

Le temps qui passe 6

Mercredi 30 décembre 2020

La raison est la fille du temps et elle attend tout de son père

Voltaire


Nashmia Noormohamed

il naît une vie qui s’écoule, en un temps infini et pourtant prédéfini, un seul temps, le même qui voit le chêne s’affirmer et l’enfant s’affermir, le même temps qui change de saisons, pour rappel …

il naît dans ce corps étroit un infime mouvement qui change le cours du monde parfois, voire invariablement le dirige, une présence qui s’impose et qui par son absence, interpelle…

il naît, comme il pleut, comme il vente, comme il fait beau, un éclat de cette nature généreuse, un écrin pour certains, un essaim pour d’autres, un sens dans ce vaste monde, une étincelle rebelle…

il naît puis il meurt, voyageant de jour comme de nuit, il traverse le temps, croit se l’approprier pour enfin comprendre que le temps est compté, mesuré, décompté, oublié, passé et unidirectionnel…

il naît en sachant qu’il mourra, s’accommodant du jour qui précède la nuit, de la nuit qui laisse place au jour; il naît pour un jour mourir, ne sachant ce qu’il adviendra sous ce ciel…

il naît une vie empruntant une route, un chemin, une certaine direction, laissant quelques empreintes, qui seront effacées dans le sable; nul ne pourrait jurer de sa trajectoire ni de sa destination réelle…

*

Si Carl Loewe n'atteint pas à la grandeur de Franz Schubert, dont il est le contemporain, ce compositeur allemand n'en reste pas moins, par son talent, son imaginaire et sa sensibilité, un créateur attachant, aux fulgurances parfois étonnantes.

Johann Carl Gottfried Loewe, né à Löbejün, près de Halle, le 30 novembre 1796, deux mois avant Schubert, reçoit de son père ses premières leçons de musique. En 1807, il devient enfant de chœur à la chapelle de la cour de Köthen ; en 1809, il part pour Halle afin d'étudier avec le théoricien et compositeur Daniel Gottlob Türk ; dès l'âge de treize ans, il écrit déjà des lieder : son opus 1 no 3, daté de 1818 (il a vingt-deux ans) est un lieder sur le célèbre Erlkönig (« Le Roi des aulnes ») de Goethe, mis en musique par Schubert trois ans auparavant mais qui ne sera publié par ce dernier qu'en 1821.

La beauté de sa voix le fait remarquer par Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie, qui lui octroie une pension annuelle de 300 thalers afin qu'il puisse se consacrer entièrement à la musique. Mais la chute de Napoléon et la fuite du roi Jérôme, en 1813, vont être lourdes de conséquences pour Loewe, qui voit disparaître ses ressources. Il étudie la théologie et la philologie à l'université de Halle, devient en janvier 1820 professeur au Gymnasium de Stettin, puis, en novembre, organiste à la Jakobikirche de cette même ville ; l'année suivante, il est nommé directeur de la musique de cette cité, poste qu'il va occuper jusqu'en 1866. 1820 est marqué par sa rencontre avec Goethe à Iéna, Goethe qui lui inspirera de nombreuses partitions. Chanteur-pianiste (il s'accompagnait lui-même) et chef d'orchestre, il entreprendra plusieurs tournées de concerts : à Vienne en 1844, à Londres en 1847, en Norvège et en Suède en 1851, en France en 1857. Victime d'une attaque cérébrale en 1864, Carl Loewe se retire à Kiel, où il meurt le 20 avril 1869.

Nous entendrons ici le Lied « die Uhr » op 123/3 Texte de Gabriel Seidl

Partout où je vais, je porte une montre ;

Quelle que soit l'heure, elle me la donne avec précision.

Un grand maître a savamment assemblé son mécanisme,

Même si sa marche ne satisfait pas toujours mes souhaits.

Certains jours, j'aurais aimé qu'elle aille plus vite,

J'aurais aimé qu'elle ralentisse parfois sa marche rapide.

Dans la peine ou la joie, le calme ou la tempête,

Quoi qu'il m'arrivât dans la vie, elle en battait la mesure.


Elle sonnait devant le cercueil de mon père et à la tombe de l'ami,

Elle sonnait au moment où s'éveillait l'amour et le jour de mes noces.

Elle sonnait devant le berceau et sonnera souvent encore

Quand viendront les jours meilleurs comme mon âme l'espère.


Et si parfois elle a ralenti, menaçant de s'arrêter,

Le maître me l'a toujours généreusement remontée.

Mais si son tic-tac cessait, alors c'en serait fini d'elle,

Nul autre que celui qui l'a conçue ne saurait la remettre en route.


Il faudrait alors que j'aille trouver le maître, il habite peut être bien loin,

Au diable sans doute, de l'autre côté de la terre, dans l'éternité !

Je la lui rendrait, suppliant et reconnaissant comme un enfant.

« Regarde Seigneur, je n'ai rien gâté, elle s'est arrêtée d'elle-même »



Le temps qui passe 5

Mardi 29 décembre 2020

L'âme a deux yeux : l'un regarde le temps, l'autre se lève vers l'éternité. Dieu demeure dans une lumière où nulle voie ne mène : qui ne devient pas elle, ne le verra jamais de toute éternité. Dieu est une grande merveille. Étant tout ce qu'Il veut, Il veut tout ce qu'Il est, sans mesure et sans but. Arrête, où cours-tu donc, le ciel est en toi : et chercher Dieu ailleurs, c'est le manquer toujours. 

Angelus Silesius – Le pèlerin chérubinique

  

Friedrich Schiller

Dreifach ist der Schritt der Zeit:
Zögernd kommt die Zukunft hergezogen,
Pfeilschnell ist das Jetzt entflogen,
Ewig still steht die Vergangenheit.

Keine Ungeduld beflügelt
Ihren Schritt, wenn sie verweilt.
Keine Furcht, kein Zweifeln zügelt
Ihren Lauf, wenn sie enteilt.
Keine Reu, kein Zaubersegen
Kann die Stehende bewegen.

Möchtest du beglückt und weise
Endigen des Lebens Reise,
Nimm die Zögernde zum Rat,
Nicht zum Werkzeug deiner Tat.
Wähle nicht die Fliehende zum Freund,
Nicht die Bleibende zum Feind.


Le cours du temps se divise en trois parties : l’avenir, qui arrive lentement ; le présent, qui fuit avec la rapidité d’une flèche ; le passé, qui est inébranlable.

Nulle impatience ne hâte la marche de l’avenir. Nulle crainte, nul doute n’arrête la fuite du présent. Nul repentir, nulle évocation ne fait mouvoir le passé.

Si tu veux accomplir heureusement le voyage de la vie, prends l’avenir pour conseil et non pour instrument de ton œuvre ; ne fais pas du présent ton ami, ni du passé ton ennemi.

*


Beethoven String Quartet No 16 Op 135 in F major.! Alban Berg Quartett - YouTube

 

Le temps qui passe 4

Lundi 28 décembre 2020

« Qu’est-ce donc que le temps? Si personne ne m’interroge, je le sais; si je veux répondre à cette demande, je l’ignore. Et pourtant j’affirme hardiment, que si rien ne passait, il n’y aurait point de temps passé; que si rien n’advenait, il n’y aurait point de temps à venir, et que si rien n’était, il n’y aurait point de temps présent. Or, ces deux temps, le passé et l’avenir, comment sont-ils, puisque le passé n’est plus, et que l’avenir n’est pas encore? »

— Saint Augustin,Confessions, Livre XI, chapitre 14


Novalis

Wenn nicht mehr Zahlen und Figuren
sind Schlüssel aller Kreaturen
wenn die, so singen oder küssen,
mehr als die Tiefgelehrten wissen,
wenn sich die Welt ins freie Leben
und in die Welt wird zurückbegeben,
wenn dann sich wieder Licht und Schatten
zu echter Klarheit werden gatten
und man in Märchen und Gedichten
erkennt die wahren Weltgeschichten,
dann fliegt von einem geheimen Wort
das ganze verkehrte Wesen fort.

Lorsque nombres et figures ne seront plus
La clef de toutes créatures,
Lorsque tous ceux qui s'embrassent et chantent
En sauront plus que les savants profonds,
Lorsque le monde reprendra sa liberté
Et reviendra au monde se donner
Lorsqu'en une clarté pure et sereine alors
Ombre et lumière de nouveau s'épouseront,
Et lorsque dans les contes et les poésies
On apprendra l'histoire de nos cosmogonies,
C'est là que s'enfuira devant un mot secret
Le contresens entier de la réalité.

*

La Symphonie n° 101 en ré majeur « L'horloge » Hob. I: 101 fait partie des douze symphonies londoniennes de Joseph Haydn. Elle doit son surnom au rythme « tic-tac » présent tout au long du deuxième mouvement. Les trois derniers mouvements ont été écrits en Autriche. Le premier mouvement a été terminé en Angleterre. La symphonie a été créée, sous la direction du compositeur à Londres le 3 mars 1794. 


Joseph Haydn, Symphony 101 'The Clock', Concertgebouw Orchestra, Harnoncourt - YouTube

Le temps qui passe 3

Dimanche 27 décembre 2020


Puisque le passé n'est plus, puisque l'avenir n'est pas encore, puisque le présent lui-même a déjà fini d'être avant même qu'il a commencé d'exister, comment pourrait-il y avoir une réalité du temps ?
Aristote

Théophile Gautier - La montre

Deux fois je regarde ma montre,
Et deux fois à mes yeux distraits
L'aiguille au même endroit se montre ;
Il est une heure... une heure après.

La figure de la pendule
En rit dans le salon voisin,
Et le timbre d'argent module
Deux coups vibrant comme un tocsin.

Le cadran solaire me raille
En m'indiquant, de son long doigt,
Le chemin que sur la muraille
A fait son ombre qui s'accroît.

Le clocher avec ironie
Dit le vrai chiffre et le beffroi,
Reprenant la note finie,
A l'air de se moquer de moi.

Tiens ! la petite bête est morte.
Je n'ai pas mis hier encor,
Tant ma rêverie était forte,
Au trou de rubis la clef d'or !

Et je ne vois plus, dans sa boîte,
Le fin ressort du balancier
Aller, venir, à gauche, à droite,
Ainsi qu'un papillon d'acier.

C'est bien de moi ! Quand je chevauche
L'Hippogriffe, au pays du Bleu,
Mon corps sans âme se débauche,
Et s'en va comme il plaît à Dieu !

L'éternité poursuit son cercle
Autour de ce cadran muet,
Et le temps, l'oreille au couvercle,
Cherche ce cœur qui remuait ;

Ce cœur que l'enfant croit en vie,
Et dont chaque pulsation
Dans notre poitrine est suivie
D'une égale vibration,

Il ne bat plus, mais son grand frère
Toujours palpite à mon côté.
- Celui que rien ne peut distraire,
Quand je dormais, l'a remonté !

*

Domenico Scarlatti, né le 26 octobre 1685 à Naples et mort le 23 juillet 1757 à Madrid, est un compositeur baroque et claveciniste virtuose italien.

Né la même année que Georg Friedrich Haendel et Jean-Sébastien Bach, Domenico Scarlatti passe la première partie de sa vie dans le sillage et l'ombre de son père, Alessandro, musicien très renommé et principal promoteur de l'opéra napolitain. Claveciniste virtuose, compositeur d'opéras, musicien de cour ou d'église, il ne parvient cependant pas à se fixer durablement et à faire carrière dans l'un des centres musicaux d'Italie où le mènent ses pérégrinations : Naples, Rome, Florence, Venise…

Quelques années avant la mort de son père, il s'installe au Portugal au service de Marie Barbara de Bragance, princesse royale, fille aînée du roi Jean V de Portugal. En 1729, elle épouse l'héritier de la couronne d'Espagne, le futur Ferdinand VI. Maître de clavecin privé de la maison de Marie-Barbara, il la suit de Lisbonne à Séville, Aranjuez et Madrid, où il termine sa vie.

Il a composé plus de 550 sonates pour clavecin d'une originalité exceptionnelle et pour la plupart inédites de son vivant. Par ce corpus, il est l'un des compositeurs majeurs de l'époque baroque. Ses œuvres occupent une place clé dans le développement du langage et de la technique de la musique pour clavier.

Nous en entendrons quatre, interprétées ici de façon magistrale entre ombre et lumière...


 

Domenico Scarlatti : sonate en si mineur K.27 par Anne Queffélec - YouTube



Scarlatti Sonata L499 K30 'Cat's Fugue' Anne Queffélec - YouTube


Scarlatti Sonata K144 Anne Queffelec - YouTube


Scarlatti sonata K492 - L014 Anne Queffelec - YouTube

Le temps qui passe 2

Samedi 26 décembre 2020

Le Temps est l'image mobile de l'éternité immobile.
Platon

William Blake

Earth's Answer

Earth raised up her head
From the darkness dread and drear,
Her light fled,
Stony, dread,
And her locks covered with grey despair.

'Prisoned on watery shore,
Starry jealousy does keep my den
Cold and hoar;
Weeping o're,
I hear the father of the ancient men.

'Selfish father of men!
Cruel, jealous, selfish fear!
Can delight,
Chained in night,
The virgins of youth and morning bear?

'Does spring hide its joy,
When buds and blossoms grow?
Does the sower 
Sow by night,
Or the plowman in darkness plough?

'Break this heavy chain,
That does freeze my bones around!
Selfish, vain,
Eternal bane,
That free love with bondage bound !'


Réponse de la terre 
 
La Terre se redressa 
Au fond de la nuit terreur & ombre. 
La lumière se sauva : 
Froid de pierre sombre ! 
Ses boucles devinrent gris désespoir. 
 
« Au rivage des eaux enfermée 
Par l’étoile Jalousie je suis surveillée 
Glace et blancheur 
Tandis que j’entends qui pleure 
Le Père des hommes anciens.  
 
« L’égoïste père des Hommes ! 
Le peureux, le cruel, l’égoïste Jaloux ! 
Le plaisir 
Que la nuit enchaîne 
Convient-il aux Jeunes Gens aux Vierges du matin ? 
 
«  Le printemps cache-t-il sa joie 
Quand bourgeons et fleurs se déploient ?  
Et le semeur ?  
Sème-t-il la nuit ?  
Les labours, est-ce de nuit ou de jour ?  
 
« Viens briser la lourde chaîne 
Qui étreint dans la glace mes os 
L’égoïste ! la vaine !  
Le poison pérenne 
Qui au servage condamne la liberté Amour » 

*

Emilio de Cavalieri (1550 – 1602), noble romain, fils du comte Tommaso de’Cavalieri, dont l’amitié avec Michel-Ange fit scandale, actif à la cour des Médicis et qui comme compositeur fut l’un des premiers à mettre en musique une pièce dans le style monodique. Il était également maître de chant, danseur et chorégraphe. En tant que diplomate, il influença de façon décisive l’élection des papes dans les années 1590. Après avoir organisé avec succès en 1599 les intermèdes des festivités du mariage de Marie de Médicis et de Henri IV, Cavalieri produisit ses propres pastorales et, en octobre 1600, l’Euridice de Rinuccini et Peri.

Cavalieri appartenait au cénacle de poètes et de musiciens réunis autour de Bardi, avec qui il collabora pour de brillants divertissements destinés au grand-duc de Toscane. Au même moment que Peri et Caccini, il expérimenta en matière de récitatifs parlando et de basse chiffrée dans ses mises en musique de pastorales de Bardi, Tasso et Laura Guidiccioni (Aminta, 1590), Guarini et d’autres. Beaucoup de ses œuvres furent composées pour la soprano de cour Vittoria Archilei et contiennent des épisodes virtuoses ainsi que des symboles d’ornements. Son œuvre la plus importante, La Rappresentatione di Anima et di Corpo… per recitar can-ando, fut exécutée à Rome en février 1600 devant les membres du Sacré Collège. Outre de longs épisodes dialogués en récitatif monodique, la Rappresentatione contient des madrigaux et des chants en mètres de danse. On la considère comme la première œuvre dramatique entièrement mise en musique, et la partition imprimée est la première à offrir une basse chiffrée.

Nous entendons ici la première scène du premier acte de l'opéra « Rappresentatione di anima e di corpo ».

En voici le texte :

Le temps, le temps s’enfuit,

Et la vie se détruit ;

Je crois déjà entendre

La trompette dernière et ces mots qui résonnent :

Sortez de votre fosse,

Cendres éparses, ossements ;

Âmes, levez-vous à présent !

Sur le champ reprenez vos corps,

Venez dire la vérité :

Était-il donc plus avisé

De servir ce vain monde

Ou le Roi souverain du Ciel ?

Oui, chacun doit entendre,

Ouvrir les yeux, comprendre

Que cette vie n’est qu’un souffle de vent

Qui s’envole en un seul instant ;

Elle naît aujourd’hui,

Elle mourra demain,

Aujourd’hui apparaît

Et demain disparaît.

Que chacun donc s’efforce,

Tant qu’il le peut encore,

De quitter tout ce qui est en ce monde,

Quelque agrément qu’il y puisse trouver,

Œuvrant avec la main, œuvrant avec le cœur,

Puisque du bien agir l’honneur est le seul fruit. 


Rappresentatione di anima et di corpo, Act I, Scena Prima: Il tempo, il tempo fugge (Tempo) - YouTube 

Matthieu Denni 

 

Le temps qui passe 1

 Vendredi 25 décembre 2020

Entête, lui, le logos et le logos, lui, pour Elohîms,

et le logos, lui, Elohîms.

Lui entête pour Elohîms.

Tout devient par lui; hors de lui, rien de ce qui advient ne devient.

En lui la vie la vie la lumière des hommes.

La lumière luit dans la ténèbre, et la ténèbre ne l’a pas saisie.

Et c’est un homme, un envoyé d’Elohîms. Son nom, Iohanân.

Il vient pour un témoignage, pour témoigner de la lumière,

afin que tous adhèrent par lui.

Il n’était pas la lumière, mais celui qui témoigne pour la lumière.

La lumière, la vraie, qui éclaire tout homme venant dans l’univers,

lui, dans l’univers, et l’univers est engendré par lui

et l’univers ne l’a pas connu.

Il est venu chez lui, mais les siens ne l’ont pas accueilli.

 

Commencement de l'évangile selon Saint-Jean (traduction André Chouraqui)

Paul Celan 

Sprich auch du
sprich als letzter,
sag deinen Spruch.
Sprich
Doch scheide das nein nicht vom Ja
Gib deinem Spruch auch den Sinn.
gib ihm den Schatten.
Gib ihm Schatten genug
gib ihm so viel
also du um dich verteilt weisst zwischen
Mittnacht und Mittag und Mittnacht.
Blicke umher.
sich: wie 's lebendigwird rings-
Beim Tode ! Lebendig !

Wahr spricht, wer Schatten spricht.
 

Paul Celan 

Parle toi aussi

parle en dernier,
dis ta parole.
Parle
Mais sans séparer le non du oui.
Donne aussi le sens à ta parole:
donne-lui l'ombre.
Donne-lui assez d'ombre,
donne-lui autant
que tu en sais partagée autour de toi entre
minuit et midi et minuit.
Regarde tout autour
vois comme ce qui t'entoure devient vivant -
Près de la mort ! Vivant !
Qui parle l'ombre
parle vrai.
« Je pourrais comparer ma musique à une lumière blanche dans laquelle sont contenues toutes les lumières. Seul un prisme peut dissocier ces couleurs et les rendre visibles: ce prisme pourrait être l’esprit de l’auditeur.» Arvo Pärt

Spiegel im spiegel a été complété en 1978, juste avant que Pärt ne quitte définitivement l’Estonie, où il subissait la censure. « Dans ma première période, j’écrivais de la musique dans laquelle plusieurs notes étaient lancées sur la page. Je ne les gardais pas comme des trésors. Je ne les tenais pas, l’une après l’autre, entre mes mains. Chaque note est déterminante, révélatrice. » Le titre de l’œuvre, qui peut aussi bien se lire « miroir dans le miroir » que « miroirs dans le miroir », se veut une référence à la multitude d’images que pourraient produire, en se réfléchissant les uns dans les autres, des miroirs disposés en plan parallèle.

Cette pièce, comme de nombreuses autres de Pärt, est fréquemment utilisée comme illustration sonore de documentaires ou de films. Elle est également la base musicale d’une œuvre de danse contemporaine de Mats Ek, Smoke/Solo for Two créée pour Sylvie Guillem en 1995. En 2005, Christopher Wheeldon utilise cette pièce pour son ballet contemporain After the Rain dansé par le New York City Ballet

 


Arvo Pärt : Spiegel im Spiegel (pour violon et piano) - YouTube