16 décembre 2023
HEINRICH SEUSE (Henri Suso)
1296 ?- 1366
Noces mystiques
Une heure en musique...
« Après Maître Eckart et Jean Tauler, Henri Suso est représentatif de l’École de spiritualité dominicaine des "mystiques rhénans" du XIVe siècle. Elle garde la vision de l'univers que lui donne saint Thomas, exalte le primat de la contemplation et, pour y arriver, le dépouillement progressif du sensible, la purification de ce qui agite et distrait, le regard sur le Christ, Vérité éternelle.
Suso insiste sur l'union au Christ par la contemplation de ses perfections et de ses souffrances. Après lui, l'accent sera mis davantage sur l'affection que sur la connaissance : on cherche ce qui émeut, on s'applique à méditer les plaies du Crucifié, les sept douleurs de la Vierge : c'est l'ère des représentations tragiques de la Passion, des Pièta, des descentes de croix... L’œuvre de Suso annonce déjà ce tournant à la fin du XIVe et au XVe siècle. »
Henri Suso est un grand mystique allemand du Moyen-Âge, il est connu pour avoir répandu la mystique rhénane de Maître Eckhart. Il est né en 1295 sur les bords du lac de Constance. Son père appartenait à la noble famille de Berg; sa mère, dont il prit le nom de jeune fille latinisé, à une famille de Sus (ou Süs). Il entre chez les dominicains de Constance à l'âge de 13 ans. Il y mène une vie plutôt relâchée jusqu’à l'âge de 18 ans, où il eut une vision qui l’amena à contempler la Sagesse, Verbe de Dieu fait homme dans son humanité souffrante. Il se livre alors à de grandes mortifications, frôle la mort à 40 ans, puis contrôle son ascèse.
Dans ce tableau de Zurbaran, visage jeune, chevelure abondante, sombre et bouclée, yeux levés vers le ciel, le moine porte le manteau noir de l’ordre dominicain qu'il écarte de la main gauche pour graver sur sa poitrine, avec un stylet, le monogramme du Christ, IHS (Jésus Sauveur des Hommes). Derrière lui, dans un paysage d'arbres et de rochers italianisant, on découvre des dominicains en conversation au pied d'un ermitage. De l'autre côté du saint, dans un paysage de bord de rivière, un frère médite auprès d'une source, le visage appuyé sur la main. Une dernière scène, mystérieuse, montre un ange à la robe rose, descendu de cheval et progressant au milieu de huttes éparpillées dans la montagne.
Après ses premières études théologiques, il est envoyé à Cologne où il connut Maître Eckart vers 1320-1325. Il revient à Constance de 1329 à 1336, comme lecteur conventuel, puis prieur. Il y écrit, pour la défense d'Eckart, Das Büchlein der Wharheit, Le Livre de la Vérité. Cet ouvrage lui attire des ennuis provenant du Chapitre provincial, puis du Chapitre général qui le dépose de sa charge priorale. Il reste alors dans son couvent et rédige Das Büchlein der ewigen Weisheit, Le petit livre de la Sagesse éternelle, publié en 1328, destiné aux " âmes simples – de ces âmes qui ne sont pas parfaites et qui ont encore quelque défaut à corriger. "
En 1334, Suso traduit ce travail en latin, mais ajoutant à son contenu il en fait un livre presque entièrement nouveau, auquel il donne le nom Horologium Sapientiae, l’Horloge de la Sagesse, dédié au Maître de l'Ordre, dont le succès fut énorme au XIVe et XVe siècle, en Allemagne, et qui fut souvent représenté dans des manuscrits.
Il se donne également à la prédication dans toute la région et veille à la restauration de l’observance religieuse dans les couvents. Souvent objet de calomnies et de détractions, il se voit abandonné par certains amis. Il exerce pourtant un ministère très apprécié auprès de plusieurs couvents de religieuses dominicaines. C'est à l'une d'elles, Elisabeth Stagel, prieure des moniales dominicaines de Töss, qu'il confie l'histoire de sa vie qu'elle mettra par écrit.
Refusant d'obéir aux ordres de l’empereur du Saint Empire romain germanique, Louis IV de Bavière, en lutte contre la papauté, les dominicains quittent Constance et se réfugient à Diessenhoven. Suso est envoyé à Ulm. On sait très peu de choses sur les dernières années de sa vie. Il rédige l'histoire de sa vie intérieure Vita ou Leben Seuses, il révise le Büchlein der Wahrheit, et le Büchlein der ewigen Weisheit, qui, avec onze de ses lettres (le Briefbüchlein), et un prologue, se sont transformés en un livre connu sous le nom de Exemplar, Exemplaire, édition revue et corrigée par ses soins.
Outre ces écrits, nous avons également cinq sermons de Suso et une collection de vingt-huit de ses lettres (Grosses Briefbuch), qui se trouve dans l'édition de Bihlmeyer.
Il meurt à Ulm en 1366 vers sa 70e année. Le concile de Constance le considéra comme bienheureux, mais sa béatification officielle est due au pape Grégoire XVI en 1831.
...et aussi à Constance :
De 1414 à 1418, le concile de Constance a pour principal objectif d’unifier l’Église catholique avec un dirigeant unique. Pendant cette période, elle compte trois papes, respectivement issus des légitimités pisane, romaine et avignonnaise. On doit la convocation du 16e concile œcuménique à Sigismond Ier, empereur d’Allemagne. Afin de garantir l’équité des élections, cette instance possède un mode de scrutin spécifique. On occulte le vote par tête pour le vote par nation.
Quatre pays sont ainsi représentés lors du concile de Constance : l’Angleterre, la France, l’Allemagne et l’Italie. A cela s’ajoute une voix supplémentaire pour le collège des cardinaux. Au terme de 45 sessions, ce concile met fin au grand schisme d’Occident et assure l’indépendance des Pères conciliaires. Les papes Jean XXIII, Benoît XIII et Grégoire XII sont arrêtés, déposés ou en fuite. Martin V devient le 206e pape de l’Église catholique en 1417.
Le concile de Constance, 16e concile général ou œcuménique, a eu lieu à Constance, en Allemagne. Il s’est déroulé entre le 5 novembre 1414 et le 22 avril 1418. Durant cet intervalle de temps, près de 45 sessions ont été organisées. Cet événement survient pour mettre fin au grand schisme d’Occident. A cette période, on comptait trois papes à la tête de l’Eglise catholique. Au XVe siècle, les dissensions politiques et religieuses sont alors à leur apogée.
En 1414, ce n’est autre que l’empereur d’Allemagne, Sigismond Ier, qui convoque le concile de Constance. L’idée de ce rassemblement est, entre autres, de restaurer la crédibilité du Saint-Siège. Il l’impose à Jean XXIII, considéré comme un antipape. Pour rappel, ce statut historique signifie qu’un individu occupe les fonctions à titre illégitime. L’Église catholique ne le reconnaît pas en tant que successeur de Saint-Pierre. Le concile de Constance est présidé par le cardinal Jean de Brogny.
Contrairement à de précédents conciles, le concile de Constance change son mode de scrutin. Cette décision s’explique par les réticences de Jean XXIII à y prendre part. Sigismond Ier prend alors l’initiative de changer le vote par tête pour le vote par nation. On distingue quatre pays participants : la France, l’Allemagne, l’Italie, ainsi que l’Angleterre. Une cinquième voix est octroyée au collège des cardinaux.
Au terme de ces 4 années de débat et de près de 45 sessions, le concile de Constance débouche sur la condamnation des réformateurs pour hérésie. Jérôme de Prague et Jan Hus sont condamnés à brûler vifs sur le bûcher. Quant à John Wyclif, traducteur et écrivain anglais, sa condamnation se fait uniquement à titre posthume. Au cours de cette période, Jean XXIII s’enfuit en 1415. La même année, Grégoire XII démissionne, tandis que Benoît XIII est déposé. En 1417, Martin V devient le 206e pape de l’Église catholique.
La principale conséquence du concile de Constance est de mettre fin au grand schisme d’Occident. Pour rappel, ce dernier induisait trois papes (légitimités romaine, pisane et avignonnaise) à la tête de l’Église catholique. Édicté le 30 octobre 1417, le décret Frequens impose une nouvelle tenue périodique d’un concile. Ce qui garantit l’indépendance des Pères conciliaires face au pape. Le concile suivant était prévu en 1423, mais est rapidement dissous. Le prochain rassemblement est prévu pour 1430.
A noter que le concile de Constance est à l’origine du concile de Bâle. Ce dernier se déroule de 1431 à 1449. Eugène IV succède alors à Martin V. De nombreuses dissensions en découlent. On observe aussi un schisme conciliaire. Au terme de plus de 18 ans de débat, le concile de Bâle finit par soutenir le conciliarisme. Cette notion induit que le concile œcuménique bénéficie de l’autorité suprême. Il est donc supérieur au pape en matière de hiérarchie. Certains théologiens avancent que l’Église est organisée sur la base d’une forme aristocratique et non monarchique. Par la suite, le conciliarisme est rejeté par les conciles Vatican I (1870) et Vatican II (1965).
Matthieu Denni
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