Théologie pour les curieux - 1er avril 2017

L'ouvrage événement
Sans conteste, la publication en français de l'ouvrage de référence sur la notion de guerre sainte dans un contexte chrétien fera date dans l'histoire des idées.

Publiée en 2015 à Philadelphie et fruit d'une quinzaine d'années de recherches sur l'idéologie religieuse qui est mobilisée pour justifier, "sanctifier", la guerre, cette étude remarquablement documentée explore les concepts de sacrifice, de pureté et de rédemption qui motivent ceux qui sont prêts à mourir et à tuer pour leur foi.

Des concepts difficiles à comprendre dans notre société "post-chrétienne" mais qui résonnent formidablement dans notre actualité. Il ne suffit pas de dire que le martyr jihadiste est fou, encore faut-il comprendre ce qui le motive, ce qui lui fait légitimer ses actes de terreurs et comprendre que nous avons les mêmes racines de violence et de terreur dans notre propre tradition religieuse. Et que nous l'ayons oublié ne change rien à l'affaire puisque la violence religieuse, même dans nos cultures est toujours prête à resurgir.

Un ouvrage indispensable pour comprendre notre époque.

Gallimard, Paris, février 2017, 560 pp., 36 €

À l'orée de sa mort en 2016, Malek Chebel, infatigable passeur de culture et défenseur d'un islam lumineux, au sens d'un islam des Lumières, s'est confiée à Fawzia Zouari, une journaliste tunisienne.

Auteur d'une traduction en français du Coran, pourtant réputé intraduisible selon certains religieux, Malek Chebel s'est toujours attaché à l'interprétation et à la distance entre l'interprétation qui pouvait être fairt au VIIe siècle et celle qui devait être faite aujourd'hui.

À l'occasion de ce regard en arrière sur sa vie, ce sont les correspondances entre toutes les traditions religieuses qui nourrissent son espérance. Il ne voit plus que l'homme,  en constante recherche de lui-même et de quelque chose qui le dépasse, que nous continuons d'appeler "Dieu" à défait de meilleur terme pour désigner la transcendance.

Desclée de Brouwer, Paris, mars 2017, 128 pp., 12.90€

Romancier à succès, Alexis Jenni, accompagné de Nathalie Sarthou-Lajus, rédactrice en chef adjointe de la revue jésuite Études fait l'éloge de la vie communautaire dans le village monastique de Bose par un adepte de la pauvreté évangélique, Enzo Bianchi.


Ce qui frappe dans cette dimension de vie communautaire, c'est sa dimension temporaire, elle se veut résolument une étape dans la vie de ceux qui la rejoignent pour un temps et résolument ouverte sur le quotidien de ceux qui la visitent.


Les auteurs explorent tous les paradoxes qui font la vie de la communauté, une véritable recherche oecuménique tout en affirmant une véritable identité catholique, une recherche du silence à l'intérieur même de la parole lorsqu'elle se fait vivante, la pauvreté qui n'exclue pas la recherche de la beauté en toute chose, surtout celle de l'âme.


Une simplicité de vie à rechercher dans nos existences.

Albin Michel, Paris, mars 2017, 216 pp., 15€




Le procès fait actuellement aux musulmans, celui de ne pas vouloir s'intégrer et accepter les valeurs républicaines, a été fait aux juifs durant tout le XIXe siècle et jusque dans les années trente. Et la volonté assimilationniste dont les juifs ont eux-même fait preuve, allant jusqu'à abandonner la pratique religieuse, n'a en rien réduit l'antisémitisme. De même, il y a fort à parier qu'une renonciation à la pratique religieuse des musulmans ne ferait pas reculer la non acceptation dans l'islam est aujourd'hui l'objet dans la société française.
Le dialogue entre deux intellectuels de haute volée permet de se rendre compte que le problème n'est pas l'islam, ni les musulmans, comme ce n'étaient alors pas les juifs. Le problème réside bien dans la République elle-même qui ne sait plus faire collectivité, "faire société" en développant l'idée même d'un destin partagé. Comment surmonter ces fractures identitaires ? Les auteurs cherchent les pistes.

Robert Laffont, Paris, 234 pp., 18.50€



 Il est courant de définir les protestants comme refusant la moindre place à Marie. C'est confondre le refus du culte marial, la place reconnue à Marie dans une fonction d'intercession auprès du Père, avec la reconnaissance de la personne même de Marie et de la place qu'elle a tenu dans ce que l'on appelle "l'économie du salut".

Martin Luther dans ce commentaire du Magnificat, le texte de l'évangile, Luc 1, 46 ss., où Marie se reconnaît comme "humble servante de la volonté de Dieu, révèle le fond de sa pensée, qui n'est finalement pas tant théologique que spirituelle.

Le commentaire a été écrit dans une période difficile, commencé en novembre 1520 alors que Luther est menacé d'excommunication, il sera fini en septembre 1521 alors qu'il a pris sa décision de tenir ferme. Et c'est l'évolution de Martin Luther lui-même qui apparaît dans son commentaire, il est en train de se rendre compte que l'on change de monde et qu'au-delà des dogmes et des argumentations logiques, il y a l'humble expérience de l'Esprit qui a parlé à Marie et à Luther.

Nouvelle Cité, Paris, 1ère éd. 1987, octobre 2016, 168 pp. 15€

Les scientifiques ne voient pas le même monde que nous. Là où nous voyons des phénomènes, ils voient des forces et des principes, des théories et des mystères à éclaircir.

Jean Staune fait ici le point, dans cet ouvrage publié en 2007 et réédité en poche dans la série Pluriel, des récentes avancées dans les domaines de la physique quantique, de l'astro-physique, de la biologie, des sciences de la conscience et des mathématiques.

Si la science ne peut dire s'il existe un Dieu, elle ne peut non plus ni l'inférer comme hypothèse ni l'exclure. Dans la lignée d'un Trinh Xuan Thuan, Jean Staune milite pour un compréhension plus globale des réalités du monde qui peuvent être, à la manière quantique, soit spirituelles soit physiques, ce qui ne s'exclue en aucune manière.

Fayard/Pluriel, Paris, janvier 2017, 538 pp. 10€

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